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I

L’année 1894 est considérée comme l’année charnière de la colonisation de notre patrie, le Bénin, par les troupes coloniales françaises ainsi que symbolisée par la défaite du roi Béhanzin et sa déportation à l’étranger. Mais cet événement ne constitue qu’un épilogue dans le long processus d’agression impérialiste contre les peuples de notre terre, contre ses Dignitaires et notamment contre ses valeurs existentielles telles la langue et les cultures. Depuis les premiers contacts européens avec les peuples d’Afrique se situant à la fin du 15è siècle jusqu’à cette date de 1894 que de crimes ont été commis sur la planète ! Au nom de la civilisation européenne proclamée unique et universelle, des civilisations entières et leurs peuples détruits comme les Amérindiens (Civilisations des Cités Mayas, Aztèques et Incas) et contre les peuples africains, l’esclavage, la traite négrière, les destructions des croyances entières avec les valeurs universelles qu’elles sous-tendent et que savons-nous encore ! La razzia se poursuit de nos jours. Ce processus de domination de la planète par les langues et cultures européennes décrit la chronique de la naissance, du développement du capitalisme jusqu’à sa phase impérialiste. Comme on le sait, nos peuples sont bien loin des frontières des colonisateurs européens et ne leur ont donc jamais cherché noise. Pourquoi donc cette agression ? C’est essentiellement parce que le capitalisme d’abord ascendant jusqu’au milieu du 19è siècle et devenu monopoliste vers la fin de ce siècle avait besoin d’abord pour la mise en valeur de ses vastes terres du Nouveau Monde de bras valides, et ensuite pour ses usines en métropole des matières premières et de débouchés pour les produits fabriqués. Pour les monopoles et les profits capitalistes, tous les crimes sont permis ! Que de torrents de sangs et de larmes les impérialistes d’Europe et plus tard d’Amérique n’ont-ils pas fait couler dans le monde ! La conquête de nos terres s’est faite avec trois armes : les missionnaires chrétiens, les marchands et les militaires pour finaliser l’œuvre largement entamée par les premiers.

Tout conquérant sait que pour gagner un peuple, il faut d’abord gagner sa conscience. Un peuple se conquiert d’abord et avant tout par la cervelle de ses hommes et la foi. Les armes physiques ne jouant qu’un rôle de parachèvement. De façon particulière, pour le territoire du Dahomey, actuel Bénin, les missionnaires chrétiens ont été mis en avant comme porteurs de civilisation pour sa colonisation.

Mais au regard de l’évolution ultérieure du royaume d’Agbomê et de tous les autres royaumes de l’aire Adja-Tado, nos pouvons affirmer que ceux-ci n’ont pu comme l’on réussi la plupart des peuples asiatiques (chinois, indiens) résister victorieusement au christianisme et ont été défaits par les religions chrétiennes. Il en fut de même de l’aire Wassangari avec la résistance des Batombu contre l’invasion islamique et aujourd’hui symbolisée par la fête de la Gaani. La colonisation faisant le reste de l’œuvre de désarticulation de ces langues et cultures. Mais cette défaite est demeurée superficielle et n’est pas allée jusqu’à la destruction complète de ces religions, langues et cultures traditionnelles qui se sont révélées plus vivaces et plus coriaces que les colonisateurs ne le croyaient. Et l’offensive récente de certaines religions importées dans notre pays avec des prêches haineux à l’encontre d’autres religions notamment traditionnelles n’est due qu’au soutien ouvert des autorités de l’Etat, notamment Kérékou-2 et 3 et puis Boni Yayi, en violation même de la constitution actuelle qui prône la laïcité de l’Etat. Il y a aussi également la reconnaissance des valeurs sous-tendant ces religions et cultures traditionnelles et à l’intégration de certaines des pratiques traditionnelles dans les pratiques des religions chrétiennes. D’où le syncrétisme galopant auquel on assiste dans notre société à l’heure actuelle. Vous en savez quelque chose, vous intellectuels traditionnels dans les couvents desquels courent la nuit bon nombre de nos concitoyens et même de dignitaires qui pourtant professent ces religions importées pour avoir des solutions à leurs problèmes.

La colonisation de notre pays qui s’est étalée de 1885 à 1918 (qui a vu la défaite des héros nationaux que furent Gbêhanzin, Bio Guera, de Kaba et des Sahouès) a complètement arraché aux dignitaires de notre pays leurs pouvoirs et attributions qu’ils avaient sur leurs peuples (pouvoirs d’administration et de juges). Ceux qui ont tenté de résister ont été déportés les uns après les autres. Une nouvelle administration a été installée à la solde du colonisateur ; la langue étrangère, le français a été imposée aux peuples et particulièrement aux enfants qui pour accéder à la science universelle doivent le faire dans cette langue étrangère. Nos peuples sans être déportés comme le furent les millions d’esclaves, objet de la traite négrière, sont cependant devenus esclaves sur leurs propres terres : leurs langues et cultures sont dominées.

L’indépendance des années 1960 n’a pas fondamentalement changé les choses. Les fils des peuples dominés et dressés par l’école coloniale et néocoloniale française se sont mués en assassins de la langue et de la culture de leurs pères. Promus Présidents de la République, ministres et autres hautes Autorités de l’administration, ils ne font qu’appliquer une politique anti-peuple, une politique dictée de l’extérieur par les puissances impérialistes, notamment la France.

Cinquante ans après ces indépendances nominales, le bilan de cette domination culturelle, linguistique et économique française sur notre pays est parlant par lui-même. Déconfiture et désastre sur tous les plans ! Tous les leviers de commande économique et industrielle du pays (Port, Télécom, Ocbn, SONAPRA, Cimenteries, Brasseries, Banques et Assurances) sont bradés ou en voie d’être bradés aux puissances étrangères, françaises en particulier. La monnaie, instrument privilégié de développement d’un pays est aux mains de la France et de l’Union Européenne. Sur le plan de l’instruction publique, les derniers résultats de fin d’année révèlent que deux élèves sur trois ont échoué au bac, plus de la moitié au BEPC et l’année est en fait blanche pour plus de la moitié des élèves du pays. Les ravages des NPE se font voir à tous les niveaux. Les ressources de l’Etat sont pillées par une classe apatride qui depuis 50 ans a dirigé le pays dans l’intérêt des puissances impérialistes, françaises en particulier. La misère tenaille la grande majorité de la population. Les statistiques officielles indiquent que 31% de la population vivent avec moins de 500 francs CFA par jour et que 73% vivent avec moins de 1000 francs par jour. Le Bénin, notre pays est classé 166è sur 177 dans le monde selon le classement à l’indice du développement humain c’est-à-dire l’un des derniers si l’on excepte peut-être les micro-Etats. Malgré cette domination impérialiste, les peuples de notre pays n’ont pas baissé les bras. Ils poursuivent leurs luttes multiformes pour leur dignité, pour la reconnaissance des pouvoirs (de juges) qu’ils continuent d’exercer sur leurs populations malgré le mépris et l’hostilité dans lesquelles les tiennent les autorités politiques de l’Etat néocolonial pour la reconnaissance de leurs langues et cultures.

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