COMMUNIQUE DE PRESSE
A PROPOS DE LA RENCONTRE DE L’EMPEREUR DE NIKKI AU PALAIS DE LA REPUBLIQUE
LA CHEFFERIE TRADITIONNELLE N’EST PAS UN ARTICLE TOURISTIQUE
Le lundi 24 avril 2017 le Président Talon a reçu au palais de la république l’Empereur de Nikki, sa majesté Chabi Naïna III à la tête d’une délégation de la cour royale. Selon les compte-rendu de la presse, sa majesté « n’a pas fait langue de bois. Il a égrené un chapelet de quelques doléances pour le développement de Nikki et l’épanouissement des filles et fils de la localité » (Le Matinal n°5068 du 25 avril 2017). L’empereur de Nikki n’aurait pas occulté les questions d’infrastructures routières, la construction d’un nouveau palais impérial, d’accès à l’eau potable et des difficultés liées à l’éducation et à la formation des enfants, etc.
On peut facilement se rendre compte que l’empereur de Nikki, lors de cette rencontre avec le président Talon, a évoqué les problèmes cardinaux de l’empire et de ses habitants mettant ainsi en relief, s’il en était encore besoin, son rôle d’administrateur et de magistrat suprême des Baatonu et garant de leurs Us et coutumes.
Mais l’intervention- réponse du chef de l’Etat a montré, juste après la déclaration de sa « volonté de faire de la chefferie traditionnelle une institution, une reconnaissance officielle » (La Presse du jour n°2865 du 26 avril 2017) ses réelles intentions. Si ce dernier a accédé à la doléance de construction d’un nouveau palais à Nikki (qu’il étend à Abomey, Porto Novo et Ouidah notamment) c’était juste à des fins touristiques. « Il faut dire que dans le cadre des projets touristiques du président de la République pour un Bénin révélé, le chef du gouvernement a entrepris de faire de la culture une valeur touristique avant de la commercialiser » (Le Matinal n°5068).
On peut percevoir là, la différence fondamentale entre la conception et le vécu de la culture par l’Empereur de Nikki et tous les dignitaires traditionnels d’une part, et le Chef de l’Etat Patrice Talon d’autre part. Pour les Rois, les dignitaires traditionnels et les patriotes, la culture constitue avant tout le socle de l’épanouissement, de l’émancipation et du développement de leurs peuples, alors que Patrice Talon ne la conçoit que sous la forme d’un article touristique à commercialiser. Ainsi, prendre en compte la culture pour l’Empereur de Nikki, c’est faire de la langue batonou (et des autres langues locales véhicules de la culture), une langue d’instruction et d’administration dans son terroir.
Lorsque Talon se dit fier de sa majesté Chabi Naïna III de Nikki et qu’on lui doit honneur et respect, il devrait commencer par reconnaitre son rôle d’administrateur et de juge qu’il continue de jouer à la suite des ancêtres malgré l’aliénation coloniale, et par rendre exécutoires les décisions de jugements traditionnels que sa cour prend lors de ses séances hebdomadaires tous les vendredis. Si le chef de l’Etat veut vraiment « faire de la chefferie traditionnelle une institution », il doit œuvrer pour que l’empereur de Nikki soit représenté au Parlement au sein d’une chambre spéciale, la Chambre des Dignitaires Traditionnels, pour donner son avis de conformité des textes votés par les députés avec les valeurs positives de notre culture. Hors de ce combat et parler de reconnaissance de la chefferie traditionnelle par l’Etat revient tout simplement à faire de nos cultures et des Chefs traditionnels des objets de folklore à exposer à la vue des touristes. Ce que tout patriotisme ne peut que condamner.
Cotonou, le 26 avril 2017
Le 2ème vice- Président
Jérôme O.NOMA
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