Cotonou, le 29 janvier 2018

AKOHA Rock Mahugnon

 

 RECOURS EN INCONSTITUTIONNALITE

 

A
Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les Membres de la Cour Constitutionnelle du Benin
COTONOU

OBJET :
- Violation des articles 71, 73, 76, 77 et 113 de la Constitution béninoise du 11 décembre 1990 par le Président de la République
- Violation des articles 35 et 77 de la Constitution béninoise du 11 décembre 1990 par le Président de l’Assemblée nationale.

 

Monsieur le Président,
Conformément aux dispositions de l’article 114 de la Loi nº 90-32 du 11 décembre 1990 portant Constitution de la République du Bénin : « La Cour constitutionnelle est la plus Haute juridiction de l'État en matière constitutionnelle. Elle est juge de la constitutionnalité de la loi et elle garantit les droits fondamentaux de la personne humaine et les libertés publiques. Elle est l'organe régulateur du fonctionnement des institutions et de l'activité des pouvoirs publics » ;
Considérant que par les dispositions de son article 3 al 3, la Constitution reconnaît à « […] tout citoyen à le droit de se pourvoir devant la Cour constitutionnelle contre les lois, textes et actes présumés inconstitutionnels » ;
Qu’ainsi, nous avons l’honneur de déférer devant la haute Juridiction la violation flagrante et répétée de la Constitution béninoise du 11 décembre 1990 en ses articles 73, 76 et 77 par le Président de la République et 35 et 77 par le Président de l’Assemblée nationale ;
La Haute juridiction doit constater l’engagement de la responsabilité personnelle du Président de la République pour outrage à l’Assemblée nationale (I) et la complicité du Président de l’Assemblée nationale pour son grave manque de loyauté à la Constitution (II)

I) SUR L’ENGAGEMENT DE LA RESPO NSABILITÉ PERSONNELLE DU PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE POUR OUTRAGE À L’ASSEMBLÉE NATIONALE
Considérant que les articles 71, 79 et 113 de la Constitution disposent respectivement que :
« - Le président de la République ou tout membre de son Gouvernement peut, dans l'exercice de ses fonctions gouvernementales, être interpellé par l'Assemblée nationale. Le président de la République répond à ces interpellations par lui-même ou par l'un de ses ministres qu'il délègue spécialement devant l'Assemblée nationale. En la circonstance, l'Assemblée nationale peut prendre une résolution pour faire des recommandations au Gouvernement. » ;
« Le parlement […]. Il exerce le pouvoir législatif et contrôle l'action du Gouvernement. » ;
« - Le Gouvernement est tenu de fournir à l'Assemblée nationale toutes explications qui lui seront demandées sur sa gestion et sur ses activités. Les moyens d'information et de contrôle de l'Assemblée nationale sur l'action gouvernementale sont: - l'interpellation conformément à l'article 71; - la question écrite; - la question orale avec ou sans débat, non suivie de vote; - la commission parlementaire d'enquête. Ces moyens s'exercent dans les conditions déterminées par le Règlement intérieur de l'Assemblée nationale. » ;
Que, dans le cadre de sa mission de contrôle de l’action gouvernementale, les Députés ont adressé plusieurs questions au Président de la République et à son gouvernement ;
Qu’à l’occasion de la présentation de vœux pour l’année 2018, le Premier Vice-président de l’Assemblée nationale, Éric HOUNDÉTÉ a fait savoir dans son discours que : « Sur seize (16) questions d’actualité posées au gouvernement, neuf (09) ont été examinées. Sur soixante (60) questions orales avec débat posées au gouvernement, dix-huit (18) seulement ont été examinées. SUR QUATORZE (14) QUESTIONS ÉCRITES ADRESSÉES AU GOUVERNEMENT, AUCUNE RÉPONSE N’A ÉTÉ ENREGISTRÉE. En 2017, le Parlement a mis sur pied deux (02) commissions parlementaires d’enquête. Les rapports des deux commissions sont toujours attendus » ;

Qu’il poursuit « Nous saluons les dispositions prises par le Président Adrien HOUNGBÉDJI et le bureau et qui ont permis d’améliorer sensiblement le taux de traitement des questions orales et des questions d’actualité ». Toutefois, il souligne qu’en ce qui concerne les questions écrites pour lesquelles le gouvernement dispose, au terme du règlement intérieur, de 30 jours pour répondre, « le constat est amer et affecte négativement les performances du parlement. » ;
Que pour finir son intervention, le premier Vice-président de l’Assemblée nationale déclare ce qui suit : « A son installation, la 7ème législature a suscité beaucoup d’espoir… Mais de plus en plus des inquiétudes montent, de plus en plus l’opinion nous interpelle. C’est comme si l’espoir que notre législature a suscité à son installation est en train de s’estomper. Nous devons en prendre conscience et faire en sorte que nos actions au cours de cette nouvelle année puissent rassurer davantage notre peuple. » ;
Qu’il est facile de noter que même la Constitution impose 30 jours au gouvernement pour répondre aux questions de l’Assemblée nationale ;
Qu’il est donc loisible de dire que le Président de la République et son gouvernement ont choisi délibérément de violer notre Constitution ;
Qu’on peut constater que le mépris du Président de la République pour notre Constitution n’est pas chose nouvelle d’autant plus qu’il a déjà été reconnu, plusieurs fois par la Cour constitutionnelle, coupable de violation de la Constitution, ce qui est constitutif d’un trouble à l’ordre constitutionnel et une grave menace pour notre démocratie chèrement acquise ;
Que la Haute juridiction doit constater la violation délibérée des articles 71 et 113 de la Constitution par le Président de la République et son gouvernement sur la base des éléments de l’espèce pour n’avoir pas fournir les réponses aux questions écrites des députés ;
Considérant, par ailleurs, que les articles 73, 76 et 77 de la Constitution béninoise disposent respectivement que :
« - La responsabilité personnelle du président de la République est engagée en cas de haute trahison, d'outrage à l'Assemblée, ou d'atteinte à l'honneur et à la probité. » ;

« - Il y a outrage à l'Assemblée nationale lorsque, sur des questions posées par l'Assemblée nationale sur l'activité gouvernementale, le président de la République ne fournit aucune réponse dans un délai de trente jours. » ;

« - Passé ce délai, le président de l'Assemblée nationale saisit la Cour constitutionnelle de ce manquement grave aux dispositions constitutionnelles. La Cour constitutionnelle statue dans les trois jours. Le président de la République est tenu de fournir des réponses à l'Assemblée nationale dans les plus brefs délais et dans tous les cas avant la fin de la session en cours. A l'expiration de ce délai, si aucune suite n'est donnée par le président de la République à la décision de la Cour, le président de la République est déféré devant la Haute Cour de Justice pour outrage à l'Assemblée nationale. » ;

Considérant que l’analyse de cette espèce démontre à suffisance que le Président de la République a choisi de bafouer et de brader notre Constitution, socle de notre démocratie, parce qu’il aurait pu tout au moins instruit ses ministres pour répondre à ces questions écrites qui ont lui été adressées par la représentation nationale ;
Que la Cour doit constater qu’elle est et continuera d’être la seule institution constitutionnelle crédible qui peut arrêter le danger qui guette notre jeune démocratie depuis l’avènement du Président Patrice TALON à la tête de notre pays afin que la paix puisse régner ;
Que la Haute juridiction constatera que les articles 73, 76 et 77 ont été violés par le Président de la République et son gouvernement ;
Qu’il est donc demandé à la Cour Constitutionnelle de constater que la responsabilité personnelle du Président de la République, Monsieur Patrice TALON, est engagée pour « outrage à l'Assemblée Nationale » sur la base des 14 questions écrites ignorées à ce jour par lui et son gouvernement, avec la complicité du Président de l’Assemblée nationale.

II) SUR LA COMPLICITÉ DU PRÉSIDENT DE L’ASSEMBLÉE NATIONALE POUR MANQUEMENT GRAVE DE LOYAUTÉ AUX DISPOSITIONS CONSTITUTIONNELLES
Considérant que la Constitution béninoise dispose respectivement en ses articles 76 et 77 que :
« - Il y a outrage à l'Assemblée nationale lorsque, sur des questions posées par l'Assemblée nationale sur l'activité gouvernementale, le président de la République ne fournit aucune réponse dans un délai de trente jours. » ;

« - Passé ce délai, le président de l'Assemblée nationale saisit la Cour constitutionnelle de ce manquement grave aux dispositions constitutionnelles. La Cour constitutionnelle statue dans les trois jours. Le président de la République est tenu de fournir des réponses à l'Assemblée nationale dans les plus brefs délais et dans tous les cas avant la fin de la session en cours. A l'expiration de ce délai, si aucune suite n'est donnée par le président de la République à la décision de la Cour, le président de la République est déféré devant la Haute Cour de Justice pour outrage à l'Assemblée nationale. » ;

Considérant que l’analyse de ces dispositions permet de comprendre que le constituant de 1990 a mis à la charge du Président de l’Assemblée nationale la responsabilité qu’il doit assumer en prenant les dispositions idoines pour la saisine de la Cour constitutionnelle, lorsque le Président de la République se rendrait coupable d’outrage à l’Assemblée nationale ;
Qu’à travers le bilan mitigé dressé par le Premier Vice-président de l’Assemblée nationale, lors de la présentation de vœux pour l’année 2018, montre et démontre que le Président de la République et son gouvernement n’ont répondu que très partiellement aux questions d’actualité posées au gouvernement ainsi qu’aux questions orales avec débat posées au gouvernement ;
Que, pis, sur les quatorze (14) questions écrites adressées au gouvernement, aucune réponse n’a été enregistrée après plus de 30 jours, ce qui confirme suffisamment la violation et le mépris du Président de la République et de son gouvernement vis-à-vis de la Constitution ;
Que le silence gardé par le Président de la République par rapport aux questions écrites à lui adressées doit être sanctionné par la haute juridiction suite à la saisine du Président de l’Assemblée nationale ;
Qu’il peut être constaté que ce dernier à préférer garder aussi le silence, se rendant ainsi complice de cet acte du Président de la République ;
Que l‘attitude du Président de l’Assemblée nationale en l’espèce rompt avec le respect des obligations constitutionnelles mises à sa charge par le Constituant du 11 Décembre 1990 et doit s’analyser comme une violation de l’article 77 de la Constitution, susceptible d’engager sa responsabilité constitutionnelle devant l’histoire ;
Qu’il s’agit ici d’une violation de la Constitution par inaction de la part du Président de l’Assemblée nationale qui doit être poursuivi pour complicité ;
Qu’il convient dès lors pour les Sages de la Cour constitutionnelle d’assimiler le mépris du Président de l’Assemblée nationale à l’égard de notre souveraine Constitution à l’expression même de la violation de son engagement de représentant du peuple ;
Qu’en conséquence, la Haute juridiction doit condamner le Président de l’Assemblée nationale, Monsieur Adrien HOUNGBÉDJI pour avoir manqué de saisir la Cour Constitutionnelle de ce manquement grave aux dispositions Constitutionnelles.
PAR CES MOTIFS, il est demandé à la PLUS HAUTE JURIDICTION de :
- Dire et juger inconstitutionnel l’acte du Président de la République ayant consisté à ne pas donner suite aux quatorze (14) questions écrites est une violation de la Constitution en ses articles 71, 73, 76, 77 et 113 ;
- Dire et juger que la responsabilité personnelle du Président de la République est engagée pour Outrage à l’Assemblée nationale ;
- Dire et juger que le Président de l’Assemblée nationale a violé les articles 35 et 77 de la Constitution pour avoir manqué de saisir la Cour Constitutionnelle.

 AKOHA Rock Mahugnon

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