POINT DE PRESSE
Cotonou, Bourse du Travail, le 15 novembre 2017

THEME :
BROUILLAGE ET PIRATAGE DES MÉDIAS : NOUVEL AXE DE BAILLONNEMENT DE LA LIBERTE DE PRESSE, DE LA LIBERTE D’EXPRESSION ET DU DROIT A L’INFORMATION AU BENIN
Présenté par Jean Kokou ZOUNON, Porte-parole du FSP

 

Introduction

Mesdames et Messieurs les Journalistes,
Merci pour avoir répondu encore une fois à notre invitation au point de presse de ce jour sur le thème : « Brouillage et piratage des médias : Nouvel axe de bâillonnement de la liberté de presse, de la liberté d’expression et du droit à l’information du peuple au Bénin. »
Il est bien connu que le brouillage et le piratage de la fréquence de certaines radios, "Soleil Fm" depuis plusieurs semaines et "Capp Fm" le lundi 6 novembre 2017 ne sont pas les premières entraves contre la liberté de presse, la liberté d’expression et le droit à l’information au Bénin. Mais ils constituent un fait nouveau, des méthodes nouvelles dont la gravité ne peut être bien saisie que dans l’examen des entraves aux libertés depuis l’arrivée au pouvoir de Patrice Talon. C’est pour cela que notre exposé passera en revue successivement :
1- Piratage et brouillage des médias : nouvel axe de bâillonnement des médias ;
2- Le pouvoir de Talon et les attaques antérieures aux libertés et notamment à la liberté de presse ;
3- Les combats des travailleurs, de la jeunesse et du peuple contre les mesures liberticides du pouvoir de Talon. Interventions du FSP ;
4- La situation actuelle et l’échec de plus en plus patent du pouvoir de Talon.

I- Nouvel axe de bâillonnement des médias : piratage et brouillage des médias
Soleil FM piraté, Capp Fm piraté et brouillé, le site du magazine l’Autre Afrique de Romuald Boko suspendu, la diffusion de "100% Bénin"de SIKKA Tv sur Canal3 interdite, le site du journal les Pharaons qui serait suspendu, telle est la situation critique des médias qui osent relayer les luttes et les cris de douleurs des travailleurs et des peuples du Bénin.
Le piratage de Soleil Fm dure depuis des semaines. La HAAC saisi ne se presse pas pour retrouver la source et les auteurs du piratage mais se lancerait dans des conjonctures. D’abord, ce serait le fait d’une radio du Nigéria voisin, mais alors pourquoi le brouillage se ferait sentir à Cotonou et non dans les autres localités du pays ? Aujourd’hui, on parle d’une surpuissance des émetteurs de Soleil Fm. Une surpuissance qui embrouillerait les émissions seulement vers Cotonou ! Mais le pot aux roses sera connu avec le brouillage de Capp Fm le lundi 06 novembre lors du passage de Laurent METOGNON de 18 heures à 19 heures. Il apparaissait alors clairement que le brouillage n’était pas un hasard, mais un acte de piratage prémédité et programmé dans le but d’empêcher les auditeurs de Cotonou d’avoir accès à des émissions dont le contenu dérange.
Sikka Tv, éjecté du bouquet Canal+ et de Strong, a commencé par relayer son émission "100% Bénin" sur la chaîne de télévision Canal3. Mais dans une promptitude après deux émissions, la HAAC envoie une mise en demeure et rappelle les règles du jeu en la matière. Alors que depuis des mois, la radio Soleil Fm est victime de piratage, la HAAC ne donne aucune information rassurante des actions pour libérer Soleil Fm. Des informations sur les réseaux sociaux faisant état de l’identification de l’émetteur pirate comme situé non loin de la direction générale de la SONEB. Que fait la HAAC pour rassurer, confirmer ou démentir ces informations et dans tous les cas pour remettre Soleil Fm et les auditeurs dans leurs droits ?

Au vu des faits graves ci-dessus relatés, nous sommes en droit de dire que la liberté de presse, la liberté d’expression et le droit d’information qui constituent des libertés et des droits fondateurs de la démocratie sont en danger au Bénin. La démocratie est en danger.

II- Le pouvoir de Talon et les attaques antérieures aux libertés et notamment à la liberté de presse.
Les atteintes aux libertés publiques par le pouvoir de Talon ont commencé très tôt, dès le mois de septembre 2016, par l’attaque contre les manifestants pacifiques étudiants et à propos de qui Toboula, le préfet du Littoral proclamait qu’il existerait des " lignes rouges" à ne pas franchir. Le gouvernement décrètera à la suite des protestations des étudiants de l’interdiction dans les faits des organisations estudiantines. Depuis lors, Toboula, en violation flagrante et permanente de la Loi sur la décentralisation a presque dessaisi le maire de ses prérogatives de police administrative pour se permettre la répression violente des dizaines de manifestations, notamment de femmes de marché Dantokpa.
Le pouvoir de Talon donnait ainsi le ton : réduire au silence toute couche, toute opposition, tout concurrent potentiel à sa politique dont la finalité a été indiquée dès le premier conseil des ministres de son gouvernement, à savoir : reconstituer et étendre l’empire économique et financier du nouveau César.
La liberté d’expression doit être réduite aux éloges et louanges aux actions de l’homme du Nouveau départ, sans aucune critique vis-à-vis du pouvoir dit de la Rupture. Et ne doit s’exprimer au Béni qu’une pensée unique, celle du nouveau départ. Alors, les organes publics d’Etat (Radio et télévision nationale) continuent l’ostracisme et l’exclusion des partis, organisations et tout auteur de vues critiques, entravant la liberté d’expression des opinions non conformistes dans un pays qui se dit pourtant démocratique. La pratique des contrats d’asservissement des médias privés qui avait été critiquée par le candidat Talon est reprise et accentuée par la corruption des hommes des médias. La communication d’Etat, que disons-nous, la propagande d’Etat, à l’instar des autres activités d’Etat, (la prise des arrêtés ministériels, les marchés de gré à gré, les propositions de nominations dans les cabinets, et plus tard la supervision directe du PAG, etc.) est centralisée à la Présidence, sous l’œil du nouveau César en une cellule de communication. Des articles siamois, signés par des journalistes stipendiés envahissent et saturent l’espace médiatique, empestant davantage l’atmosphère étouffante créée par la faim et la misère matérielle aggravées par la politique désastreuse du nouveau pouvoir.
La hargne du pouvoir contre la liberté d’expression, la liberté de presse et le droit à l’information du peuple s’est décuplée avec la chasse à l’opposition politique déclarée et de plus en plus critique contre l’instauration rampante d’une nouvelle autocratie dans le pays. La mise en avant de la fameuse "affaire cocaïne" contre Monsieur Sébastien Adjavon entrainera la fermeture en novembre 2016, dans la violation de la procédure par la HAAC de plusieurs chaînes de radios et de télévision : Soleil Fm, Sikka Tv, E-télé, Eden Tv, la Béninoise Tv, Unafrica Tv et la Chrétienne Tv, etc. Les arguments les plus fallacieux sont avancés par le président de la HAAC contre la liberté de la presse et le droit à l’information. La main du pouvoir ne pouvait plus être dissimulée sous la prétendue autonomie de la HAAC. Le peuple pouvait alors se rendre compte que la liberté de presse, le droit à l’information étaient réellement menacés par le pouvoir en place. La lutte contre la politique de famine, la lutte pour le pain devait également prendre en charge la lutte pour la liberté.

III- Les combats des travailleurs, de la jeunesse et du peuple contre les mesures liberticides du pouvoir de Talon Interventions du FSP

Le pouvoir de Talon voulait semer la terreur et son bras exécutant à Cotonou, le préfet Toboula, s’acharnait à instaurer la peur. Mais devant la réalité d’une politique affameuse, prédatrice, népotiste, autocratique, le peuple ne pouvait continuer de se taire. La faim s’est aggravée dans les foyers de la petite vendeuse des bords des rues et du petit artisan déguerpis violemment de leur lieu de travail sans aucune alternative ni accompagnement. Les travailleurs ne pouvaient continuer de se taire contre les privatisations sauvages et l’accaparement des secteurs vitaux de l’économie par Talon et son clan. Le peuple a senti que la fermeture des médias était une atteinte grave à ses libertés d’expression chèrement acquises. Les dénonciations des organisations syndicales, des partis et organisations démocratiques, des personnalités et journalistes patriotes ont fait reculer le pouvoir et la HAAC. Les scellés posés aux radios fermées ont été levés. Mais la répression contre Sikka-Tv s’est poursuivie avec son retrait du bouquet Canal+ et de Strong.
La colère du peuple s’est ouvertement concentrée contre le projet funeste de révision de la Constitution qui tendait à concentrer la gouvernance prédatrice, autocratique et dictatoriale. Le peuple a dit NON. Le Front pour le Sursaut Patriotique s’est constitué dans ce combat, rassemblant la plus vaste coalition d’opposition politique et sociale contre le pouvoir de Talon. L’échec de son projet a fait sortir le nouveau César en furie qui menace le peuple de gouverner désormais par la ruse et la rage.
Mais le peuple sait désormais à quoi s’en tenir. La gouvernance ne peut plus se faire uniquement dans le cadre de la loi. La ruse fait désormais partie de la panoplie des actions du pouvoir en place.

IV- La situation actuelle et l’échec de plus en plus patent du pouvoir de Talon.
La naissance du Front pour le Sursaut Patriotique a correspondu alors à un début d’essor des travailleurs et de la jeunesse contre la nouvelle autocratie. Le pouvoir a tenté de contrecarrer ces actions en renforçant les entraves contre les libertés publiques. On peut se souvenir des aboiements (le mot n’est pas trop fort) du préfet Toboula contre la déclaration déposée auprès des autorités de la mairie de Cotonou, conformément à la loi, par le FSP pour une marche le 22 juin 2017. Il aura fallu la levée de ton des responsables et organisateurs du FSP, dont notamment l’organisateur central, le camarade Laurent METONGNON, pour faire reculer honteusement le pouvoir. On fera circuler par bande annonce sur la chaîne Canal3, au soir le 21 juin, à la veille de la marche, que le président Talon autorisait la marche. Un Président de la République qui autorise une simple marche pacifique, voilà là où en est réduite la gouvernance au Bénin. Voilà qui autorise également à voir et confirmer que toutes les entraves aux libertés, les représailles fiscales contre les organes de presse véritablement indépendants sont du fait, des instructions du président de la République, Patrice Talon. Mais manifestement, la tentative de réprimer les marches pacifiques à Cotonou a échoué. Après le 22 juin, les organisations syndicales ont pu organiser leur marche contre la gouvernance de talon, montrant que le dialogue social prôné par le pouvoir n’est que leurre. Du reste, le chef du patronat qui avait signé la charte du dialogue social ainsi que nombre d’opérateurs économiques sont pourchassés avec des redressements fiscaux pendant que des exonérations et autres avantages fiscaux sont octroyés aux entreprises du clan du Chef de l’Etat. Etrangler et éliminer tous les concurrents économiques potentiels, éliminer par la ruse et la rage tous les opposants politiques, destituer les maires non acquis à sa cause et enfin se donner une base de fraude électorale avec son RAVIP et SAFRAN pour des hold-up électoraux, tout en affamant le peuple et en accaparant au profit de son clan les ressources publique, telle apparaît clairement au peuple et à tout observateur honnête, la politique de Talon.
Alors, les mouvements de grève se multiplient également, à la justice (magistrats, greffiers), au port autonome, à la santé contre l’autoritarisme déployé par le nouvel autocrate et son acharnement à tout privatiser et tout accaparer. Le pays est alors entré dans une crise multidimensionnelle. Le PAG est en panne. La lutte contre la corruption est depuis longtemps rangée dans les placards et l’impunité règne avec la présence au gouvernement et leur reconduction de nombreux pilleurs bien connus dans des dossiers documentés (Maria-gléta, machines agricoles, Iccs-service, mafia domaniale, Safran, marché gré à gré, etc) L’économie stagne et les ressources publiques en réduction. Le climat social est de plus en plus tendu. Les ministres sans pouvoir sous une autocratie sont incapables de trouver de solution. L’autocrate lui-même est obligé de venir négocier les conditions de cessation d’une grève sans convaincre les travailleurs qui exigent un accord écrit. Ils n’ont pas confiance à la parole donnée du Chef de l’Etat, Voilà où est la situation de la gouvernance de Talon. Le peuple ne croit plus à la parole donnée. Une autre gouvernance est donc manifestement appelée. De nombreuses voix en dehors du FSP le réclament. Et le Front pour le Sursaut Patriotique, à l’écoute du peuple, dans une déclaration solennelle au court d’un meeting géant le 13 octobre 2017 à la Bourse du Travail, a demandé au Président de la République de prendre la véritable mesure de la situation et « d’accéder à l’exigence pressante de la réunion d’une Assise nationale d’ici le 31 décembre 2017 pour revoir la gouvernance du pays. » Le FSP décide d’organiser le 03 novembre 2017 une gigantesque marche à Cotonou, pour appuyer cette exigence
Toboula menacera de poursuite judiciaire quiconque aura exercé son droit d’expression contre le Ravip. Le FSP le bat et organise, après une conférence publique le 26 octobre 2017, une campagne d’affichage contre cette arnaque technique, politique, électorale et financière qu’est le Ravip avec Safran.
A la veille de la marche du FSP que le pouvoir ne peut plus interdire sans soulever une colère plus grande des masses populaires, le gouvernement de Talon, en Conseil des ministres transformé en tribunal, sur la base d’un rapport de l’IGF qui n’a jamais écouté le mis en cause, condamne et demande à la justice de poursuivre Laurent METONGNON « pour placements hasardeux dans une banque en difficulté… dans le seul intérêt inavoué de bénéficier des commissions occultes » sic
Tout notre peuple éveillé a compris qu’il s’agit là d’un acharnement politique pour penser distraire non seulement Laurent METONGNON, mais le FSP et tous ceux qui se battent et dénoncent la gouvernance mafieuse de Patrice Talon. De sources concordantes, il se murmure que le pouvoir aux abois, aculé face à l’exigence de la réunion des Etats généraux du peuple pour le 31 décembre au plus tard, pense effrayer le peuple en commençant par s’attaquer à des principaux responsables du FSP. Et le peuple a vu juste, puisque c’est justement à ce moment que se sont révélées encore plus clairement les nouvelles méthodes de bâillonnement de la liberté de presse, de la liberté d’expression et du droit à l’information au Bénin.

Conclusion
Le piratage des médias et le brouillage des émissions sont des actes de guerre. On pirate et on brouille les émissions d’une force ennemie. Soleil Fm est-elle devenue une force ennemie ? Une émission de Capp Fm avec Laurent METONGNON est-elle l’acte d’un ennemi pour être brouillée ? La persistance du piratage et du brouillage laissent penser que les autorités du pays, la HAAC et le gouvernement prennent pour ennemis tous les citoyens qui refusent d’être considérés comme des employés de la société Talon et Compagnie, tous les citoyens qui se refusent d’être considérés comme des locataires dans leur propre pays.
Ensuite, le piratage et le brouillage persistants pose un problème de sécurité publique et nationale au plus haut niveau. Les autorités chargées de la sécurité ne peuvent se taire face au piratage et au brouillage pendant des mois d’une chaîne de radio située sur le territoire national sans s’inquiéter et sans réagir. Incapacité, démission ou complicité ? Voilà les questions que le FSP se pose et qui interpellent le pouvoir de Patrice Talon.
En tout état de cause, le Front pour le Sursaut Patriotique dénonce avec la dernière rigueur le piratage et le brouillage des émissions radio et notamment de Soleil Fm. Le FSP dénonce la passivité de la HAAC et l’indifférence et/ou la complicité du gouvernement et notamment des autorités chargées de la sécurité nationale.
Le Front pour le Sursaut Patriotique exige l’arrêt immédiat du piratage et du brouillage des émissions radios, le rétablissement de Soleil Fm dans ses droits. Il appelle le peuple à poursuivre ses luttes pour la garantie de la liberté d’expression, de la liberté de presse et du droit à l’information et se tenir prêt à des actions contre le piratage des radios et le brouillage de leurs émissions.
Le Front appelle les travailleurs, la jeunesse à poursuivre et intensifier leurs combats multiformes contre la gouvernance autocratique, népotiste, affameuse et mafieuse du pouvoir de de Talon et pour la réunion des Etats généraux en vue d’un gouvernement patriotique et de probité.
Merci.

Note : cliquer ici pour télécharger l'intégralité de la déclaration

 

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